Saint-Nazaire au départ du Pouliguen
Étape 78 (18 juillet), celle dont j’ai tant rêvé
Le Pouliguen – La Baule – Pornichet – Villès Martin – Saint-Nazaire
Comme ces derniers jours, je pars très tôt le matin pour moins marcher sous le soleil qui tape dur ces temps ci. Aujourd’hui un pic de chaleur est annoncé sur la façade Atlantique, alerte rouge par météo France…
Je quitte Le Pouliguen en quête d’une boulangerie pour compléter mon petit déj frugal. J’aime bien le Pouliguen, on déambule au milieu de villas vintages quelquefois cernées par des immeubles modernes qui n’hésitent pas à s’adosser directement contre celles-ci. Des quartiers pavillonnaires résistent à l’assaut du temps, on y sent une atmosphère de vacances permanentes.
De l’autre côté du port commence La Baule urbanisée à outrance.
À la fin des années 1960, pour doubler l’accueil des touristes, un vaste projet d’aménagement, ayant pour but de construire une immense marina sur l’emplacement actuel des marais salants de la presqu’île de Guérande, ainsi que la construction des routes qui vont avec, a failli effacer de la carte ce patrimoine inestimable pour céder aux appétits voraces des promoteurs de l’immobilier et du tourisme de masse. Heureusement des militants de Mai 68 ont empêché que ce projet aboutisse en faisant des manifestations qui ont eu lieu à Saint-Nazaire, Nantes et même jusqu’à La Rochelle.
Partout sur le littoral des saisonniers s’affairent à rendre la plage toute belle, les rues bien propres pendant que madame promène son toutou, miss ventre plat fait son jogging en brassière. Je me fais aborder par un monsieur en vélo qui me demande si je n’étais pas au Casino à huit heures, je lui réponds que non, je suis allé à la boulangerie mais pas au Casino, c’est le lendemain que je réaliserai que le casino en question n’était pas la supérette où je fais parfois mes courses mais l’endroit où il y a des machines à sous… Pas grave on discute un bon bout de chemin.
Sur le GR34 La Baule, Le Croisic ont des consonances touristiques, du soleil et des crêperies, mais je trouve que c’est un peu trop urbanisé, ici la nature n’existe presque plus, c’est dommage.
Aujourd’hui je ne marche pas je glisse sur mon petit nuage qui me transporte au pont de Saint-Nazaire, je réalise que je suis au bout de mon rêve, que j’ai réussi à marcher sur le GR34 tout autour de la Bretagne que j’aime tant.
Sur la plage de Monsieur Hulot, un peu après Pornichet, je rencontre un jeune randonneur breton plein d’enthousiasme qui s’élance pour un long périple sur le GR34, il entame sa deuxième journée. Entre celui qui termine et celui qui commence l’attirance se fait comme deux aimants que l’on rapproche, appuyés sur nos bâtons, nous devisons sur le sentier des douaniers, c’est vrai que je passe dans la catégorie des finishers, il me complimente pour le trajet accompli, je l’encourage pour pour son aventure en devenir et me permets de lui glisser un petit mot sur le poids du paquetage que l’on transporte (quand je vois son équipement, on dirait le sac de Sam Gamegie). Bon chemin l’ami.
Comme j’en ai pris l’habitude, dès que c’est possible, je descends rejoindre le bord de l’eau et les plages humides pour éviter des passages de sable sur le sentier, une ou deux fois ce n’est pas très heureux je m’égare un peu. Quand je ne peux pas éviter, régulièrement je dois m’arrêter pour vider mes chaussures où il n’y a déjà pas assez de place pour mes pieds, alors ce n’est pas pour y mettre du sable en plus.
Deux trois fois le sentier éboulé ou trop dangereux est détourné, je monte et descend pas mal d’escaliers, longe des plages et les kilomètres s’accumulent, encore une fois il y en a plus que prévu, taxiCo qui me ramène près de Quimper va être obligée de m’attendre.
Au détour d’un virage je vois au loin la ligne fine et haubanée du pont qui semble flotter par dessus la Loire pour relier Saint-Nazaire à Saint-Brévin, plus de 3,3 km de long quand-même.
Je passe devant les pêcheries hautes perchées au dessus du niveau de l’eau à marée basse, il fait très chaud mais j’avance d’un pas gaillard sur le sentier escarpé qui s’élève et redescend dans d’ultimes convulsions. Une fois passé Villès-Martin, plus grand chose ne me sépare du port de Saint-Nazaire, toutefois la traversée de celui-ci s’avère longue, chaude, bruyante au milieu des chantiers de constructions navales, où se montent des bateaux gigantesques. Mais le sentier démarre, ou se termine, au pied du pont de Saint-Nazaire, j’irai donc au kilomètre zéro. Je me sens quand même un peu déboussolé par toute cette activité industrieuse
Pont de Saint-Nazaire, fin du GR34
Arrivé au pont de Saint-Nazaire, je m’attendais à quelque chose pour marquer le lieu,c’est quand même le début ou la fin du GR34 :-), mais il y a juste un panneau affichant « Le Mont-Saint-Michel 2000km », bon, je fais une photo…
Ça y est j’y suis, je sais qu’il me reste encore un petit bout de chemin entre Plozévet et Concarneau, mais je suis à Saint-Nazaire, trois mois et deux jours après mon départ du Mont-Saint-Michel et 78 étapes pour boucler le presque tour de la Bretagne. Le GR34 Arzal Saint-Nazaire aura été vite avalé. Devant ce panneau, au milieu de personnes qui attendent une navette pour traverser le pont, je ne me vois pas lever les bras au ciel en m’écriant je l’ai fait, pourtant j’en ai rêvé.
Je rejoins taxiCo qui m’attend quelque part à 500m de là, sur un parking à l’ombre des arbres. J’entre le lien sur mon téléphone et me laisse guider par Google Maps, je la vois de loin et quand nous nous retrouvons, là je lève les bras au ciel, là j’extériorise « je l’ai fait » et nous partageons nos émotions.
Enfin je tombe le sac à dos et troque mes baskets (de compression) contre mes vieilles crocs spacieuses et me régale d’une orange et d’eau fraîche, savourant cet instant d’éternité. Je revois des moments dans les Côtes d’Armor où regardant derrière moi je voyais le littoral de la Côte d’Émeraude s’étirer sur des kilomètres se noyant dans la brume à l’horizon en me disant que j’avais marché tout ça.
Je repense aux amis rencontrés, Clémentine, Paul et Mika compagnons de la première heure jusqu’à Saint-Malo, Guilaine et ces rencontres de bout du monde aussi improbables que joyeuses et pétillantes, Patrick, dans ce splendide passage avant Plougasnou et jusqu’à Morlaix, puis Alan jusqu’à Plozévet où j’ai du quitter l’aventure pour quelques jours, Alan qui finira le GR34 en 72 étapes, Éric jusqu’à l’île aux Moines parti pour les sommets pyrénéens.
Bien sûr la team CMJ-M, pour tous ces moments passés ensemble, pour leur amitié indéfectible, les encouragements constants, les petits repas mitonnés par dame Marie, les steaks cuits dans la casserole et tant de choses encore. Et Co, sherpa, taxi, compagne de randonnée, avec notre fille à l’autre bout de la France, toujours présente, soutien inaltérable profond et réconfortant.
C’est bon de réaliser que l’on concrétise un rêve et que ce rêve est un bien précieux surtout quand il est accompli avec le concours d’autres personnes.
Merci.
Bonjour,
Ce panneau a saint nazaire declare officiellement le debut ou la fin du gr 34 ?
Les deux en fonction du sens. Si vous faites le sentier des douaniers depuis le Mont Saint-Michel, le pont de Saint-Nazaire sera la fin (officielle), sinon si vous partez du pont de Saint-Nazaire, ce sera le début d’une belle aventure de plus de 2000 km sur le GR34 en direction du Mont-Saint-Michel.
Amicalement
Philippe
Bonjour Philippe,
Je viens de découvrir votre site en faisant des recherches autour du GR 34.
Pour commencer, félicitations et merci!
Félicitations pour la qualité de synthèse de votre voyage et merci pour nous la faire partager!
Comme vous, je souhaite faire le tour du GR 34 en 3 mois environ entre juin et aout 2025.
Je me pose donc de nombreuses questions et commence gentiment à voir comment je vais organiser cela.
Si vous êtes disponible, je serai donc ravi d’échanger avec vous autour de votre expérience.
Je comprendrai également que vous n’ayez pas le temps de me répondre et quoi qu’il en soit, la qualité de restitution de vos étapes vont déjà m’être d’une aide précieuse.
Je vous laisse en plus de mon mail mes coordonnées téléphoniques si vous êtes disponible pour appel.
Merci encore
Bonjour David
Merci pour ce commentaire élogieux.
A la base je voulais juste enregistrer le plus possible de souvenirs et d’impressions pour plus tard, pour ne pas oublier. Puis je me suis pris au jeu du blog et j’ai pris un réel plaisir à consigner mes étapes au jour le jour.
Randonner sur le GR34 (ou ailleurs) pendant plusieurs semaines nous reconnecte à la nature, aux choses simples, c’est l’occasion de belles rencontres sympathiques et que la Bretagne est riche et hospitalière.