GR34 Plougrescant – Port l’épine
Étape 23 (9 mai)
GR34 Plougrescant – Port l’épine
J’avais tellement soif que dans une haie de bambous j’ai essayé de casser des tiges pour boire l’eau qu’elles contenaient, mais pour mon plus grand malheur il n’y avait rien, c’était tout sec. Heureusement un peu en contrebas, sur des grandes feuilles de rhubarbe sauvage, il y avait des petites flaques de rosée que j’ai léchées avidement même si des picots acérés m’irritaient la langue.
Mais t’es con, pourquoi tu n’as pas pris une bouteille?
Attends Lucciano, j’en avais une, j’en ai même pris deux. Mais le lecteur ce qu’il veut, c’est du frisson, de l’aventure, de l’extrême, ce qui l’intéresse c’est quand le walker avance péniblement sur la crête avec des précipices vertigineux de chaque côté et, quand immanquablement, une roche cède sous ses pieds entraînant un éboulement qui dégage des nuages de poussière sans fin. C’est pas possible, il va chuter happé par l’avalanche qui prend corps. Et à ce moment là, l’hélico de la prod le récupère in extremis et le soulève dans les airs loin de la tourmente du bas. Voilà ce qu’il veut le lecteur, sinon il écoute France Info.
Bon arrête tes conneries, tu as fait quoi aujourd’hui?
Aujourd’hui, je suis parti tardivement du camping, des fois que l’on ait ramené mes biens – ce qui n’arriva pas…
J’ai passé une commande sur Amazon, avec livraison pour le lendemain, d’une nouvelle poche à eau et d’une tasse. Je récupère ça demain à Louannec et je pars sur le GR34 Plougrescant vers Port l’Épine.
Au Gouffre de Plougrescant, je passe devant la fameuse maison construite entre les rochers, toujours impressionnant, je mets un photo que j’ai prise il y a quelques années car les propriétaires laissent en permanence des voitures garées devant.
Puis, sous le soleil, j’ai suivi toute la pointe après Plougrescant hérissée de gros blocs de granit qu’on appelle tors. Ils se sont formés il y a des millions d’années suite à des mouvements tectoniques gigantesques et ont été façonnés par les périodes de gel – dégel successives, il n’y avait pas encore de mer et la Bretagne était une chaine de montagne,
Ils sont là telles des sentinelles géantes et minérales scrutant la lande fleurie et la mer parsemée de roches éparses, comme autant de rejetons perdus dans l’océan, essayant, par je ne sais quelles forces telluriques, de rassembler auprès d’eux toute cette famille éparpillée.
Parfois des maisons sont adossés contre ces blocs infrangibles, qui utilisent leur masse pour protéger un mur ou la demeure presque entièrement.
J’ai rencontré une sémillante randonneuse avec qui j’ai fait un bout de chemin et pas mal d’écarts car, tout à nos bavardages, nous ne regardions plus trop les indications du GR34.
Lors d’un détour, au moment où l’on reprenait la bonne direction, je me suis rendu compte que j’étais à un endroit que j’ai longtemps essayé de retrouver. Nous étions venus il y a quelques années avec ma wife (adorée) déposant notre fille (adorée) à Lannion.
Je me rappelle, nous avions pique niquer ici à Île de Coz Castel et fait une belle balade sur les longues bandes de galets, flânant tout un après midi ensoleillé profitant de la marée pour aller sur des iles proches de la côte. Tout seul j’aurais suivi le GR34 sans savoir que j’étais si proche de cet endroit, superbe au demeurant. Avec Ghislaine, nous nous sommes quittés à Port Blanc là où le sentier devenait galets et route bitumée, où les tors se faisaient rares. Un peu plus loin je vois l’Île aux Femmes qui a une belle histoire.
Dans une succession de plages que longe le Sentier des douaniers, je continue cette super journée à cheminer comme un bienheureux. Je galère un peu pour me désaltérer, mais ça ne n’empêche pas de jouir de paysages de rêve.
Ce soir je dors au camping des 7 iles à Port L’Épine avec la plage de Keriec à quelques mètres. Le camping est plutôt chic mais les tarifs pour un randonneur du début mai restent corrects. Je soulage le poids de mon sac à dos d’une boite de cannellonis qui font un excellent repas.
Et demain je franchirai les 500km.